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les acteurs à la queue d'une charrette; les jurons étaient taxés; les arbres de mai étaient coupés; les ours, dont les combats amusaient le peuple, étaient tués; le plâtre des maçons puritains rendait décentes les nudités des statues; les belles fêtes poétiques étaient interdites. Des amendes et des punitions corporelles interdisaient même aux enfants « les jeux, les danses, les sonneries de cloches, les réjouissances, les régalades, les luttes, la chasse,» tous les exercices et tous les amusements qui pouvaient profaner le dimanche. Les ornements, les tableaux, les statues des églises étaient arrachés ou déchirés. Le seul plaisir qu'on gardât et qu'on souffrît était le nasillement des psaumes, l'édification des sermons prolongés, l'excitation des controverses haineuses, la joie âpre et sombre de la victoire remportée sur le démon et de la tyrannie exercée contre ses fauteurs. En Écosse, pays plus froid et plus dur, l'intolérance allait jusqu'aux derniers confins de la férocité et de la minutie, instituant une surveillance sur les pratiques privées et sur la dévotion intérieure de chaque membre de chaque famille, ôtant aux catholiques leurs enfants, imposant l'abjuration sous peine de prison perpétuelle ou de mort, amenant par troupeaux les sorcières au bûcher 2. Il semblait qu'un nuage noir se fût appe

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gained

دم

1. 1648, trente en un jour. Une d'elles avoua qu'elle avait été à une assemblée où étaient cinq cents sorcières. Pictorial history,

t. III, p. 489.

2. In 1652 the kirk-session of Glasgow « brot boyes and servants before them, for breaking the Sabbath and other faults. They had

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santi sur la vie humaine, noyant toute lumière, effa. çant toute beauté, éteignant toute joie, traversé çà et là par des éclairs d'épée et par des lueurs de torches, sous lesquels on voyait vaciller des figures de des= potes moroses, de sectaires malades, d'opprimés silencieux.

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II

Le roi rétabli, ce fut une délivrance. Comme un fleuve barré et engorgé, l'esprit public se précipita de tout son poids naturel et de toute sa masse acquise dans le lit qu'on lui avait fermé. L'élan emporta les digues. Le violent retour aux sens noya la morale. La vertu parut puritaine. Le devoir et le fanatisme furent confondus dans un discrédit commun. Dans ce grand

clandestine censors, and gave money to some for this end. » History of Civilisation, I, 346.)

(Buckle,

Even yearly in the 18th century the « most popular divines » in Scotland affirmed that Satan « frequently appears clothed in a corporeal substance. » (Ibid., 367.)

« No husband shall kiss his wife, and no mother shall kiss her child on the Sabbath-day. » (Ibid., 385.)

The quhilk day the Sessioune caused mak this act, that ther sould be no pypers at brydels, etc. (Ibid., 389.)

1719. The presbytery of Edinburgh indignantly declares : « Y ea, some have arrived at that height of impiety as not to be ashamed of washing in water and swimming in rivers upon the holy Sabbath. » (Ibid.)

« I think David had never so sweet a time as then, when he was pursued as a partridge by his son Absalom. » (Gray's Great and Precious Promises.)

Voir tout le chapitre où Buckle a décrit, d'après les textes, l'état de l'Ecosse au dix-septième siècle.

reflux, la dévotion, balayée avec l'honnêteté, laissa l'homme dévasté et fangeux. Les parties supérieures de sa nature disparurent; il n'en resta que l'animal sans frein ni guide, lancé par ses convoitises à travers la justice et la pudeur.

Quand on regarde ces mœurs à travers Hamilton et Saint-Évremond, on les tolère. C'est que leurs façons françaises font illusion. La débauche du Français n'est qu'à demi choquante; si l'animal en lui se déchaîne, c'est sans trop d'excès. Son fonds n'est pas, comme chez l'autre, rude et puissant. Vous pouvez casser la glace brillante qui le recouvre, sans rencontrer le torrent gonflé et bourbeux qui gronde sous son voisin1; le ruisseau qui en sortira n'aura que de petites échappées, rentrera de lui-même et vite dans son lit accoutumé. Le Français est doux, naturellement civilisé, peu enclin à la sensualité grande ou grossière, amateur de conversation sobre, aisément prémuni contre les mœurs crapuleuses par sa finesse et son bon goût. Le chevalier de Grammont a trop d'esprit pour aimer l'orgie. C'est qu'en somme l'orgie n'est pas agréable: casser des verres, brailler, dire des ordures, s'emplir jusqu'à la nausée, il n'y a là rien de bien tentant pour des sens un peu délicats; il

1. Voyez, dans Richardson, Swift et Fielding, mais surtout dans Hogarth, la peinture de cette débauche brutale. Encore récemment dans un finish à Londres, les gentlemen s'amusaient à soûler de belles filles parées en robe de bal; puis quand elles tombaient inertes, à leur faire avaler du poivre, de la moutarde et du vinaigre. (Flora Tristan, 1840, Promenades dans Londres, chap. vIII. - - Témoin ocu aire.)

est né épicurien, et non glouton ou ivrogne. Ce qu'il cherche, c'est l'amusement, non la joie déboutonnée ou le plaisir bestial. Je sais bien qu'il n'est pas sans reproche. Je ne lui confierais pas ma bourse, il oublie trop aisément la distinction du tien et du mien; surtout je ne lui confierais pas ma femme: il n'est pas net du côté de la délicatesse; ses escapades au jeu et auprès des dames sentent d'un peu bien près l'aigrefin et le suborneur. Mais j'ai tort d'employer ces grands mots à son endroit; il sont trop pesants, ils écrasent une aussi fine et aussi jolie créature. Ces lourds habits d'honneur ou de honte ne peuvent être portés que par des gens sérieux, et Grammont ne prend rien au sérieux, ni les autres, ni lui-même, ni le vice, ni la vertu. Passer le temps agréablement, voilà toute son affaire. « On ne s'ennuya plus dans l'armée, dit Hamilton, dès qu'il y fut. » C'est là sa gloire et son objet; il ne se pique ni ne se soucie d'autre chose. Son valet le vole : un autre eût fait pendre le coquin : mais le vol était joli, il garde son drôle. Il partait oubliant d'épouser sa fiancée, on le rattrape à Douvres; il revient, épouse; l'histoire était plaisante: il ne demande rien de mieux. Un jour, étant sans le sou, il détrousse au jeu le comte de Caméran. « Est-ce qu'après la figure qu'il a faite, Grammont peut plier bagage comme un croquant? Non pas, il a des sentiments, il soutiendra l'honneur de la France. » Le badinage couvre ici la tricherie; au fond, il n'a pas d'idées bien claires sur la propriété. Il régale Caméran avec l'argent de Caméran; Caméran eût-il mieux fait,

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ou autrement? Peu importe que son argent soit dans la poche de Grammont ou dans la sienne : le point important est gagné, puisqu'on s'est amusé à le prendre et qu'on s'amuse à le dépenser. L'odieux et l'ignoble disparaissent de la vie ainsi entendue. S'il fait sa cour aux princes, soyez sûr que ce n'est point à genoux une âme si vive ne s'affaisse point sous le respect; l'esprit le met de niveau avec les plus grands; sous prétexte d'amuser le roi, il lui dit des vérités vraies. S'il tombe à Londres au milieu des scans au m dales, il n'y enfonce point; il y glisse sur la pointe du pied, si lestement qu'il ne garde pas de boue. On n'aperçoit plus sous ses récits les angoisses et les brutalités que les événements recèlent; le conte file prestement, éveillant un sourire, puis un autre, puis encore un autre, si bien que l'esprit tout entier est emmené, d'un mouvement agile et facile, du côté de la belle humeur. A table, Grammont ne s'empiffrera pas; au jeu, il ne deviendra pas furieux; devant sa maîtresse, il ne lâchera pas de gros mots; dans les duels, il ne haïra pas son adversaire. L'esprit français est comme le vin français : il ne rend les gens ni brutaux, ni méchants, ni tristes. Telle est la source de cet agrément les soupers ne détruisent ici ni la finesse, ni la bonté, ni le plaisir. Le libertin reste

Sire,

Eh!

1. Le roi jouait au trictrac: arrive un coup douteux : « Ah! voici Grammont qui nous jugera; Grammont, venez nous juger. vous avez perdu. Comment! vous ne savez pas encore.... ne voyez-vous pas, sire, que si le coup eût été seulement douteux, Ces messieurs n'auraient pas manqué de vous donner gain de cause? »

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