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domestique, les caresses délicieuses d'une famille adorée; voilà ce qu'il eût fallu à mon cœur, peu avide de dignités.

Puisque le sort en a décidé autrement, je me résigne et me voue encore à reparaître sur une mer déjà couverte de tant de débris j'aborderai de nouveau cette tribune dont je m'étais éloigné, et qui a été comme la roche Tarpéïenne pour tant de mes prédécesseurs.

Une seule chose m'a plu dans cette nouvelle, c'est la certitude bien flatteuse qu'elle me donne, qu'après avoir, pendant plus de trois ans et demi, parcouru ostensiblement une carrière où il est difficile de se maintenir dans l'estime des hommes probes, je conserve encore celle de mes concitoyens qui, malgré les menées calomnieuses de l'intrigue, m'ont, dès le premier tour de scrutin, placé pour la troisième fois parmi les législateurs de la France.

Je suis intimement persuadé, qu'en me retenant dans un Conseil où fermentent sans cesse les passions les plus orageuses, ils m'ont, sous plus d'un rapport, rendu un fort mauvais service, et que peut-être leur choix me vaudra bien des peines dans l'avenir; mais je ne dois pas moins toute ma reconnaissance au sentiment d'affection et d'estime qui les a portés à me nommer encore, et, sous cet unique point de vue, j'attache d'autant plus de prix à ma réélection, que l'assemblée électorale qui m'a nommé, ayant rempli ses principales opérations avec décence, sans

désunion et dans le plus grand calme, ce qui devient bien rare aujourd'hui, il en réjaillit, pour ainsi dire, une sorte de reflet glorieux sur ceux qui ont été l'objet de ses choix.

Je n'ai point hésité à exprimer ces douces émotions; elles émanent de la probité même, ainsi que du véritable honneur; aussi, loin de chercher à les taire, j'aime à m'applaudir de les éprouver.

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Est-il donc possible qu'un véritable ami du bien et de la patrie, après avoir rempli deux missions très-difficiles qui lui furent confiées par ses concitoyens, puisse demeurer indifférent à l'idée d'être honoré encore de leurs suffrages, accordés spontanément et sans aucune sorte de démarches de sa part, sur-tout, lorsque l'ambition, la malignité et l'envie n'ont épargné aucun soin pour l'exclure? S'il a su traverser des époques épineuses de passions et de partis, sans avoir jamais prostitué sa voix ni sa plume, n'est-ce pas, dans la précieuse estime de ses compatriotes, qu'il trouve la plus douce récompense de sa conduite et de ses travaux ? sans doute il peut se faire que les circonstances soient telles, qu'il n'accepte qu'avec beaucoup de répugnance les nouveaux témoignages de confiance qu'on veut bien lui déférer; mais il est impossible qu'il puisse se refuser à la satisfaction intérieure d'en avoir été jugé digne.

N.0 70.

29 GERMINAL.

DISCOURS

Sur un ouvrage posthume de Bailly.

» Integer vitæ scelerumque purus. >> HORACE. Odes.

La veuve de l'illustre et infortuné Bailli, qui est réduite aujourd'hui à un état d'honorable indigence, m'ayant fait prier de présenter au Conseil des Cinq-cents un ouvrage posthume de son époux, je me suis empressé de lui rendre ce léger service, malgré la difficulté de parler convenablement de Bailli, devant les hommes qui devaient m'entendre et dont quelques-uns applaudirent à ses bourreaux : je reparus donc hier à la tribune, où, pour mieux faire valoir l'ouvrage, je crus utile de donner quelques développemens à l'annonce que j'en fis; ils parurent intéresser le Conseil qui en ordonna l'impression.

Je parlai ainsi :

CITOYENS,

Une veuve, respectable par ses vertus et par ses malheurs, vous présente par mon organe l'hommage d'une production nou

vellement imprimée et qui a pour titre Essai sur les Fables et sur leur Histoire. »>

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«Cette veuve est celle de Bailly, et l'Essai sur les Fables est l'ouvrage posthume de cet homme illustre, que le crime a enlevé à la patrie et aux arts, et dont je m'honore d'avoir été collègue en 1789.

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Qui ne se rappelle, à ce nom si beau le jour à jamais mémorable où, dans un jeu de Paume devenu immortel, Bailly prononça le premier ce serment sublime, créateur de la liberté, en face d'une cour encore toute puissante qui, la minute d'après, pouvait se faire apporter sa tête! époque d'innocence, d'enthousiasme et de véritable courage! oh! combien un jour l'histoire s'enrichira de ton brillant souvenir ! »

« Je me tairai sur les services importans. rendus à l'Etat par Bailly, sur le genre horrible de supplice qui termina sa glorieuse carrière, ainsi que sur les longs regrets que sa perte a laissés dans l'âme de tous les amis du bien; j'aurais trop à dire à cet égard; il faudrait rappeler des circonstances douloureuses qui pourraient réveiller des sentimens, légitimes sans doute, mais propres à fomenter les divisions et les haines; un jour peutêtre je m'occuperai de cet objet; quant à présent, malgré la satisfaction personnelle que je serais certain d'éprouver, je crois devoir m'imposer à moi-même le sacrifice de la manifestation de ma sensibilité, et parlà rendre un digne hommage à la mémoire du vertueux Bailly. »

Je m'abstiendrai également de parler des ouvrages antérieurs de cet écrivain, éminemment distingué dans les fastes de la littérature; il n'est sans doute, dans cette enceinte, personne qui ne sache qu'ils sont du petit nombre de ceux que le double mérite des pensées et du style consacre aux suffrages de la postérité.

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« Le plus bel éloge que je puisse faire de l'Essai sur les Fables est d'annoncer qu'il m'a paru digne des ouvrages qui l'ont précédé, malgré que la mort prématurée de l'auteur l'ait empêché d'y mettre la dernière

main. >>

« C'est toujours, d'une part, cette douce philosophie, cette morale persuasive, cette nuance touchante de sentiment; et de l'autre, cette élégance soutenue, cette élocution enchanteresse, simple, fleurie, sans prétention; cet art si rare de jeter du charme et de l'intérêt sur les discussions les plus arides et les plus séches; enfin cette heureuse netteté d'expressions et d'idées que devraient bien étudier ceux qui se mêlent aujourd'hui d'écrire. »

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« L'auteur se propose de ramener la fable aux notions historiques qui en ont été la source; il prouve que ce qu'elle a de merveilleux a été créé en différens temps par l'imagination féconde des poètes et ce nouveau genre de discussions lui offre l'occasion naturelle de développer la vaste érudition qu'il avait acquise. »

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« Peut-être quelques lecteurs lui en vou

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